Surcoûts des politiques publiques, mauvaise performance de la navigation aérienne, un transport aérien français particulièrement pénalisé

Surcoûts des politiques publiques, mauvaise performance de la navigation aérienne, un transport aérien français particulièrement pénalisé

À l’occasion d’une conférence de presse conjointe, Laurent Timsit, Délégué Général de la FNAM, Bertrand Godinot (Directeur Général France d’easyJet) et Olivier Mazzucchelli (PDG de Transavia France), ont dévoilé une étude conduite par le cabinet ASTERÈS comparant les coûts d’exploitation en France, avec ceux existant dans les principaux pays européens ainsi qu’en Turquie, aux Qatar et aux Émirats Arabes Unis, en s’attachant particulièrement à l’impact des politiques publiques.

Cette dernière révèle un surcoût structurel pour les compagnies basées et opérant en France, aggravé en 2025 par la hausse de la fiscalité et un contexte opérationnel dégradé. Une trajectoire à contre-courant des politiques européennes, au détriment de l’économie, des territoires et de la transition environnementale.

Un désavantage structurel croissant pour la France

Les conclusions sont sans appel : la France est désormais l’un des environnements les plus coûteux pour opérer des vols commerciaux, et l’écart avec les pays voisins s’est accentué en 2025.

En effet, l’étude montre qu’opérer un vol en France coûte plus cher que dans l’ensemble des grands pays européens analysés, à l’exception des Pays-Bas (où les redevances à l’aéroport de Schiphol ont augmenté de plus de 40% pour 2025) pour le court et moyen-courrier, et du Royaume-Uni pour le long-courrier aller-retour avec escale.

Pour un opérateur long-courrier type, l’effet cumulé des politiques publiques représente un surcoût pouvant atteindre jusqu’à 4.5 milliards d’euros par an par rapport à des opérations basées au Moyen-Orient. Sur l’ensemble des hubs européens concurrents, la France se classe désormais parmi les trois environnements les plus coûteux : jusqu’à 200 € d’écart par passager liés aux seules politiques publiques.

2025 : la fiscalité renforce le décrochage français

Le triplement de la taxe de solidarité sur les billets d’avion (TSBA) au printemps 2025 a renforcé ce déséquilibre. Ses premiers impacts ont d’ailleurs été évalués :

  • Croissance du trafic en baisse en France depuis le début de l’année (+2.9% en France contre +4.2 en moyenne en Europe)
  • Hausse des tarifs, particulièrement sur les vols domestiques (+9,54 € par passager en classe économique pour un aller/retour).
  • Stagnation des capacités cet été au départ de la France (+1,3 %), quand l’Europe enregistre encore une croissance significative (+4,4 %).
  • Chute des réservations internationales vers la France, entraînant une baisse potentielle de 3,5 millions de visiteurs étrangers en 2025[1].

Au total, la perte de recettes économiques liées au seul tourisme est évaluée à 2,3 milliards d’euros, pour un manque à gagner fiscal de plus de 800 millions d’euros. Un montant proche, à lui seul, de la recette attendue de la taxe.

Une situation à contre-courant de l’Europe

À l’inverse, plusieurs pays comme l’Allemagne, l’Italie, la Suède ou l’Irlande, ont décidé d’assouplir ou de réviser leur taxation aérienne pour préserver leur compétitivité, la France applique une stratégie contraire.

Ce mouvement fragilise l’ensemble de la chaîne du transport aérien : compagnies, aéroports, sous-traitants, territoires régionaux et tourisme international ; et contribue à une perte d’activité du pavillon français, au bénéfice de compagnies étrangères opérant depuis d’autres plateformes européennes.

“Les faits sont désormais incontestables : la France est devenue l’un des environnements les plus coûteux et les plus contraignants d’Europe pour opérer. La fiscalité, les réglementations et les performances opérationnelles cumulées renchérissent le coût d’exploitation des vols, freinent l’activité, déplacent du trafic vers l’étranger et réduisent nos marges d’investissement pour la transition environnementale.” précise Olivier Mazzucchelli, PDG de Transavia France.

Un environnement opérationnel parmi les plus dégradés d’Europe

À ces facteurs économiques s’ajoutent des difficultés opérationnelles persistantes. Sur les dix premiers mois de l’année, la navigation aérienne française a généré plus de 6,4 millions de minutes de retard, en hausse de 50% par rapport à 2024.

Un vol survolant la France subit en moyenne 5,6 fois plus de retards que dans le reste de l’Europe, pour un coût estimé à 813 millions d’euros pour les compagnies en 2025.

À ces difficultés s’ajoutent des grèves successives dans la navigation aérienne, entraînant des perturbations majeures, allant jusqu’à la suppression totale de vols.

Avec plus de 300 journées de grève en vingt ans, la France détient un record européen que personne n’envie et qui se traduit concrètement : en 2025, un passager survolant notre espace aérien a près de six fois plus de chances d’être retardé qu’ailleurs en Europe. Ce n’est pas tenable pour les passagers ni pour les compagnies.” déclare Bertrand Godinot, Directeur Général France d’easyJet.

Une double erreur économique et environnementale

La stratégie fiscale française pénalise non seulement la croissance du secteur, mais rend plus difficile le financement de la transition environnementale.

Le ralentissement de l’activité va en effet fragiliser les capacités d’investissement dans :

  • Le renouvellement de flotte,
  • Le carburant d’aviation durable (SAF),
  • L’innovation technologique.

Ce mécanisme entraîne au contraire un déplacement du trafic vers l’étranger, notamment hubs européens et extra-européens — sans réduction des émissions globales.

Les faits sont là : la France applique un cadre réglementaire, fiscal et opérationnel plus pénalisant que ses voisins. Une situation qui fragilise nos compagnies, réduit l’attractivité du territoire et complique le financement des investissements indispensables à la transition environnementale. Nous ne demandons pas un traitement particulier. Nous demandons des règles comparables à celles de nos voisins pour opérer, investir et décarboner. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas.” conclut Laurent Timsit.

[1]Étude FNAM sur la base des engagements de réservation comparés entre les principales capitales européennes après l’entrée en vigueur de la hausse de la taxe sur les billets d’avion.